La saisie-contrefaçon en matière de marque a été créée en 2007 1 et son actualisation en 2014 2 a permis d’uniformiser la procédure sur l’ensemble des droits protégés.
Elle fait partie de la famille des ordonnances sur requête.
Relevons que le recours à une ordonnance sur requête article 145 du code de procédure civile a été jugé à plusieurs reprises comme une saisie-contrefaçon déguisée et constituant de ce fait un abus et un détournement de procédure 3.
L’existence d’une mesure d’instruction plus spécifique prévue dans le code de la propriété intellectuelle exclurait a priori le recours au texte plus général du code de procédure civile.
Ainsi, il apparaît plus prudent de solliciter exclusivement des ordonnances sur requête art L. 716-7 dans une procédure en contrefaçon.
Définition de la saisie-contrefaçon
La saisie-contrefaçon est une action exorbitante de droit commun fondée sur l’article L. 716-7 du code de propriété intellectuelle en matière de marques et a pour objectif d’établir la matérialité de la contrefaçon. Elle a donc une vocation probatoire et non conservatoire.
En outre, la saisie-contrefaçon peut être l’occasion de solliciter le juge pour ordonner au saisi de produire, sous astreinte le cas échéant, une pièce dont l’existence (et non le contenu) a été prouvée par la saisie-contrefaçon.
La saisie-contrefaçon n’a pas pour finalité de mettre fin à la contrefaçon : la saisie de tous les stocks et outils de production ne sont pas possibles.
La procédure en saisie-contrefaçon peut être introduite avant toute action civile ou pénale (art. L 716-7 al. 5), en cours de procès, en première instance ou en appel (Cass. Com., 14 sept. 2010), au fond comme en référé. Le requérant a seulement l’obligation de se pourvoir « au fond, par la voie civile ou pénale » (art. L 716-7 al. 5) dans un délai de « vingt jours ouvrables ou de trente et un jours civils si ce délai est plus long » (art. R. 716-4 CPI) suivant le jour de la saisie.
La requête doit préciser les objets à saisir 4.
La saisie-contrefaçon fait partie de la famille des ordonnances sur requête, elle est donc rendue de manière non contradictoire et offre au requérant un effet de surprise appréciable.
Le juge peut faire procéder « soit à la description détaillée, avec ou sans prélèvement d’échantillons, soit à la saisie réelle des produits ou services prétendus contrefaisants ainsi que de tout document s’y rapportant » (art. L. 716-7 al. 2 CPI) ainsi que tout matériel de fabrication ou de distribution.
La saisie description permet de réaliser une saisie par sa simple description.
La saisie peut se faire « en tout lieu » où il existe des preuves de contrefaçon (art.L716-7 al. 2 CPI) et notamment dans des locaux utilisés ou non par le contrefacteur, au greffe d’un tribunal 5, dans les locaux des douanes 6, entre les mains d’un huissier après un constat d’achat 7 ou parce qu’il possède des pièces d’une saisie-contrefaçon antérieure 8 .
La valeur ajoutée du détective privé
Comme en matière d’ordonnance sur requête, la loi française sur la saisie-contrefaçon ne prévoit pas l’apport d’un commencement de preuves préalable par le demandeur.
Cependant, la réalité diffère et les juges préfèrent de plus en plus 9 s’assurer du bien fondé de la requête par l’apport d’un minimum de preuves de l’atteinte aux droits de propriété intellectuelle :
« s’agissant d’une mesure d’une exceptionnelle gravité puisqu’autorisant la saisie-contrefaçon et l’accès à des documents d’une société de manière non contradictoire, il convient que la demande ne repose pas sur de simples affirmations ou allégations non étayées par un minimum de pièces » 10.
Aussi, la directive CE n° 2004-48 du 29 avril 2004 à l’origine de la création de la saisie-contrefaçon prévoit, elle, que le demandeur devra présenter « des éléments de preuve raisonnablement accessibles pour étayer ses allégations » 11.
Ainsi, le détective privé a un rôle majeur à jouer en matière de saisie-contrefaçon. Comme pour toutes les mesures d’ordonnance sur requête, ses investigations préalables sont déterminantes pour emporter la décision du juge.
Si la saisie-contrefaçon est la reine des preuves en matière de contrefaçon, elle est moins pratiquée que l’on pourrait l’imaginer car elle est coûteuse et contraint à une assignation au fond dans un délai restreint.
1. Loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007 de «lutte contre la contrefaçon», transposition de la Directive CE n°2004-48 du 29 avril 2004, et son décret d’application n°2008-624 du 27 juin 2008
2. Loi n° 2014-315 du 11 mars 2014 renforçant la lutte contre la contrefaçon
3. CA Paris, ch. 04, sect. A, 27 mars 2002 et Cass. 1ere civ, 28 novembre 2012, n°11-20531
4. CA Paris, 4e ch., sect. B, 10 décembre 2004
5. CA Paris, 4e ch., 20 décembre 2000
6. Cass. com., 26 oct. 1999, n° 96-20488
7. CA Paris, pôle 5, 2e ch., 26 avril 2013
8. Cass. Com., 8 juillet 2008, n° 07-15075
9. Mathieu Berguig, avocat spécialisé en PI, chroniqueur juridique pour le Journal du net, article du 14.12.12 http://www.journaldunet.com/economie/expert/52993/un-proces-verbal-de-constat-ne-doit-pas-servir-a-contourner-les-regles-sur-la-saisie-contrefacon.shtml
10. CA Paris, Pôle 1, 3e ch., 28 janvier 2014
11. Directive CE n° 2004-48 du 29 avril 2004, Article 7 – Mesures de conservation de preuves – 1°